Fiche n°105

Depuis 2016, le ministère de l’Écologie fait appel des jugements rendus en faveur de l’association Paysages de France

Présentation

Hormis Nicolas Hulot et contrairement à leurs prédécesseurs, les ministres de l’Écologie qui se sont succédé depuis 2016 ont fait systématiquement appel des jugements rendus en faveur de l’association Paysages de France en vue de faire respecter les dispositions du Code de l’environnement relatives à l’affichage publicitaire. Alors que les questions de l’association font face à un silence du ministère, le caractère répétitif des demandes d’annulation des décisions de justice – visant pourtant à faire appliquer la loi – peuvent s’apparenter à de véritables entraves au travail de cette association. Le dernier appel, en date du 6 juillet 2020, devant la cour administrative d’appel de Douai, mentionne, de plus, un motif d’annulation inédit et lourd de conséquences en précisant que la préfecture « dispose d’un pouvoir discrétionnaire quant au choix de faire constater ou non l’infraction ».

Description

Paysages de France est la seule association nationale à mener, depuis 20 ans, une action continue sur l’ensemble du territoire en faveur du respect des lois et réglementations en matière d’affichage publicitaire (91 jugements ont été rendus en sa faveur par 28 tribunaux administratifs différents).
Entre le 10 juin 2016 et le 3 septembre 2020, le ministère de l’Écologie a fait appel de huit jugements rendus en faveur de l’association Paysage de France concernant des infractions en matière d’affichage publicitaire (publicités, pré-enseignes, enseignes). Ces procédures font suite au refus de préfets de mettre en œuvre les dispositions prévues par le Code de l’environnement pour faire cesser ces infractions. Si jusqu’à présent, les requêtes du ministère ont été rejetées par les cours d’appel administratives, ces procédures entrainent de longues et couteuses démarches pour l’association. En outre, en agissant de la sorte le ministère de l’environnement donne un signal extraordinairement négatif puisqu’il équivaut à cautionner le refus de préfets de faire respecter le Code de l’environnement et à un soutien de fait à ceux-là mêmes qui le bafouent.
Le premier de ces appels, en juin 2016, est le fait de la ministre de l’écologie Ségolène Royal. Il est inédit car aucun de ses prédécesseurs n’avait fait appel des 68 jugements rendus, depuis 2001, en faveur de Paysages de France. Ce premier appel a été suivi de trois autres à l’initiative de Ségolène Royal et de quatre interjetés par les ministres François de Rugy, Elisabeth Borne et Barbara Pompili. Depuis 2016, Nicolas Hulot est le seul ministre de l’Écologie à n’avoir pas engagé de telles procédures, ce qui interroge quant au caractère intentionnel, et non issu d’une simple routine technocratique, de ce genre de démarche.
Dans cette fiche, nous nous concentrons sur deux procédures parmi les huit en cause.

Première procédure :

Août 2011 :
Paysages de France signale au préfet des Hauts-de-Seine 75 dispositifs, publicités et enseignes en infraction dans la commune de Colombes.

28 août 2015 :
Après près de quatre ans de relances sans réponse au préfet des Hauts-de-Seine, l’association saisit la justice.

28 juillet 2016 :
Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise sanctionne le préfet des Hauts-de-Seine pour ne pas avoir fait respecter le Code de l’environnement sur son territoire.

29 septembre 2016 :
La ministre chargée de l’Écologie, Ségolène Royal, interjette appel du juge-ment en faveur de Paysages de France auprès de la cour administrative de Versailles. Elle demande son annulation pure et simple au motif que le préjudice est non établi et que, dans le cas d’espèce, c’est le maire et non le préfet qui est responsable de l’éventuel préjudice.

19 octobre 2017 :
La cour administrative d’appel de Versailles rend son jugement : rejet de la requête du ministère, l’État est condamné à verser 2 000 € de frais de justice à l’association.

Deuxième procédure :

Après de multiples alertes concernant l’accumulation de publicités en infraction à l’entrée de la commune de Vauxbuin, dans l’Aisne, l’association Paysages de France saisit la justice pour qu’il soit enjoint au préfet de l’Aisne de respecter les dispositions du Code de l’environnement qui s’appliquent en matière de publicité sur mobilier urbain.

30 juin 2020 :
Jugement du tribunal administratif d’Amiens qui donne raison à l’association.

3 septembre 2020 :
Le ministère interjette appel du jugement en faveur de Paysages de France auprès de la cour administrative de Douai. Le ministère se prévaut de l’article L581-32 pour un motif d’annulation inédit et lourd de conséquences en précisant que la préfecture « dispose d’un pouvoir discrétionnaire quant au choix de faire constater ou non l’infraction ».

Type d'action collective sanctionnée

  • Recours juridique afin de faire respecter le Code de l’environnement

Institution responsable

  • Ministère de l’Écologie

Preuves

  • Les appels formés par le ministère
  • Les 4 arrêts rendus par les cours administratives d’appel.

Conséquences pour l’association

  • Coût en temps et ressources afin de faire face aux appels du ministère

Sources

  • Entretien avec l’association, Pierre-Jean Delahousse, 09/12/2020
  • Articles de presse :

 « Picardie : Trop de pubs à l’entrée de la ville selon le tribunal administratif », Le journal de Ham, 16/12/2020, URL : https://www.lejournaldeham.fr/2020/07/13/picardie-trop-de-pubs-a-lentree-de-la-ville-selon-le-tribunal-administratif/

  • Communiqué de l’association :

 « Affichage publicitaire, le scandale : Barbara Pompili s’oppose à l’application du Code de l’environnement », Paysages de France, 08/11/2020, URL : https://paysagesdefrance.org/actualites/199/affichage-publicitaire-le-scandale-barbara-pompili-soppose-a-lapplication-du-code-de-lenvironnement/
 « Le tribunal administratif d’Amiens sanctionne l’utilisation dévoyée du ’mobilier urbain’ publicitaire », Paysages de France, 11/07/2020, URL : https://paysagesdefrance.org/actualites/190/le-tribunal-administratif-d-amiens-sanctionne-l-utilisation-devoyee-du-mobilier-urbain-publicitaire/

Date