Le comité Justice et Vérité pour Adama a été constitué pour demander la transparence sur l’action de la police après qu’Adama Traoré soit décédé lors de son interpellation le 19 juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise.
Dès ce jour, la porte-parole du Comité, Assa Traoré, a exprimé des critiques publiques de la police et de la justice, mais aussi à l’égard de la maire de Beaumont-sur-Oise, Nathalie Groux. Elle lui a reproché l’absence de condoléances et les refus successifs à des demandes de rassemblement sur la voie publique. Elle l’a accusé de s’être « rangée du côté de la police et des violences policières ».
L’élue avait déjà déposé plusieurs plaintes pour menaces de mort et outrages. La Maire a répondu à ces critiques par l’annonce d’un nouveau dépôt de plainte, en diffamation cette fois, contre Assa Traore. Elle a ensuite fait la demande au conseil municipal du 17 novembre 2016 d’autoriser le financement par le budget communal des frais de justice liés à cette plainte.
Les membres du comité se sont rassemblés à l’Hôtel de ville pour assister au conseil municipal. La police leur en a bloqué l’accès. Plusieurs conseillers d’opposition ont refusé de siéger et le conseil municipal a été repoussé à une date ultérieure. Le rassemblement a été dispersé par les forces de l’ordre. La Maire n’a finalement pas déposé la plainte pour diffamation.
Le 19 avril 2018, Serene Traoré, un frère d’Adama Traoré, est condamné à quatre mois de prison ferme et 600 euros d’amende pour outrage à l’encontre de la maire de Beaumont-sur-Oise, lors de faits déroulés le 22 juillet 2016, trois jours après la mort de son frère.
Assa Traoré a été entendue par la police le mardi 1er octobre 2019 suite à une plainte en diffamation publique des gendarmes qui ont interpellé son frère. En cause, deux publications sur la page Facebook « La Vérité pour Adama » où les noms des gendarmes responsables de l’interpellation mortelle de son frère sont cités. Si le collectif mentionne fréquemment leurs noms pour demander leur mise en examen, s’attaquer aux pages Facebook, dont Assa est officiellement l’administratrice, constituait un moyen de voir la plainte aboutir, dans la mesure où elle cible un individu et non un groupe. Une seconde plainte, pour « organisation d’un évènement sportif non-déclaré », suite à l’initiation à la boxe prévue à l’occasion d’un pique-nique à Beaumont-sur-Oise, a également ciblé Assa Traoré. Depuis, trois autres plaintes des policiers sont venues s’ajouter à ces deux premières.
Des poursuites ont également été engagées contre Bagui Traoré pour pour insultes, menaces de mort et violences physiques sur six policiers municipaux et gendarmes au cours du rassemblement à la Mairie de Beaumont sur Oise le 17 novembre 2016. Son frère Ysoufou dit Youssouf, 22 ans, est également poursuivi pour des outrages et menaces de mort à l’encontre de deux agents de police. Le premier a été condamné à huit mois de prison ferme pour violences, assortis d’une interdiction de séjour de deux ans à Beaumont-sur-Oise. Le second a été condamné à six mois de prison dont trois avec sursis.
Bénéficiant d’une couverture médiatique inédite pour ce genre d’affaire, le Comité de soutien « Justice et Vérité pour Adama » a régulièrement dénoncé dans les médias un acharnement des autorités municipale, policière et juridique.
La pression médiatique mise par le Comité de soutien et les avocats de la famille sur la procédure (contestation des premiers rapports d’autopsie, dépaysement du procès, etc.) a entrainé de nombreuses marches arrière des autorités judiciaires, constituant des aveux cachés de formes d’entrave au bon déroulé de l’enquête et au travail du Comité de soutien.
Les plaintes pour diffamation ciblent directement l’activité militante du collectif – à savoir la dénonciation des policiers en cause dans la mort d’Adama Traoré
L’incarcération et les condamnations des frères d’Assa Traoré sont sujets à caution : condamnés pour « outrage et rébellions », ces actes se sont produits dans le cadre de protestations face au traitement policier puis judiciaire et politique de la mort d’Adama Traoré.
Ici, la multiplication des amendes ou des plaintes en justice indique une forme de “harcèlement” de basse intensité visant - notamment par le temps, l’argent et l’énergie que requiert la réponse à ces attaques -, à entraver le fonctionnement normal du comité.