Fiche n°108

Le gouvernement reporte à de multiples reprises l’agrément d’Anticor pour agir en justice contre la corruption

Présentation

Anticor est une association fondée en Juin 2002 pour lutter contre la corruption et rétablir l’éthique en politique. Pour agir en toute indépendance, Anticor a choisi de ne bénéficier d’aucune subvention. Son financement est assuré uniquement par des dons et les cotisations de ses adhérents. Depuis 2013 l’association bénéficie d’un agrément lui permettant de se porter partie civile dans des procès. Début 2021, le gouvernement reporte la décision de renouvellement de l’agrément à de multiples reprises sans raison valable, menaçant la poursuite de certains procès en cours.

Description

Août 2020 :
Anticipant largement sur l’expiration à venir de son agrément – devant survenir le 15 février 2021 –, l’association Anticor a formé une nouvelle demande de renouvellement dès le mois d’août 2020. Après avoir reçu confirmation par accusé de réception, le dossier de renouvellement a toutefois été "égaré" par les services administratifs, puis renvoyée fin septembre.

2 Octobre 2020 :
Un récépissé, marquant le début d’instruction du dossier, est remis le 2 octobre 2020 à Anticor. Selon le Décret n° 2014-327 du 12 mars 2014, la décision d’agrément ou de refus doit être notifiée dans un délai de quatre mois à compter de la date de délivrance d’un récépissé. Le ministère avait donc jusqu’au 2 février 2021 pour statuer sur cette demande de renouvellement de l’agrément.

23 octobre 2020 :
L’attribution des agréments anti-corruption, ouvrant une capacité d’action en justice simplifiée pour les trois associations Anticor, Sherpa et Transparency international France est normalement soumise à l’accord du Garde des sceaux. Néanmoins, l’association Anticor s’est porté partie civile dans une affaire impliquant une suspicion de prise illégale d’intérêts contre le ministre de la Justice Eric Dupont Morreti. Ce dernier et ses services sont donc désaisi du "dossier anticor" le 23 octobre 2020 au profit des services du Premier ministre, Jean Castex.

Décembre 2020 :
Après de plusieurs semaines sans nouvelles, les services de l’État demandent à Anticor l’identité de son plus gros donateur, expliquant vouloir s’assurer de son indépendance. Ce à quoi l’association a répondu par la négative revendiquant la confidentialité des donateurs ainsi que le caractère illégal de cette requête selon le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD). La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) rendra en janvier un avis confirmant que le gouvernement n’a pas le droit de demander à une association l’identité de ses donateurs et adhérents, protégés par le respect de la vie privée.

2 Février 2021 :
Alors que le délai imparti est écoulé, la décision d’attribution de l’agrément a été repoussé au 10 Février, l’affaire est médiatisée depuis plusieurs jours déjà et le bras de fer devenu public. Depuis plusieurs semaines, des rumeurs et des "infox" sont propagées dans la presse par des détracteurs d’anticor et un parlementaire, membre de la majorité, qui accuse sans fondement la présidente de l’association de parjure. C’est une véritable entreprise de déstabilisation qui est mise en place visant à porter atteinte à la réputation de l’association et ses dirigeants (attaques ad-hominem) dans le but de justifier un retrait de son agrément par le gouvernement.

10 Février :
Report du délai au 12 Février, alors même que l’agrément d’Anticor expirait le 15 Février. Le gouvernement n’a, jusqu’ici, pas accepté son renouvellement, jugeant insuffisantes les réponses apportées par l’association sur son fonctionnement et ses donateurs.

14 Février 2021 :
L’agrément de l’association Anticor a été prorogé temporairement jusqu’au 2 avril 2021, selon un arrêté publié dimanche 14 février au Journal officiel (JO). L’instruction complémentaire du gouvernement porte sur la « conformité du fonctionnement de l’association à ses statuts », les « garanties de régularité en matière financière et comptable », le « caractère désintéressé et indépendant de ses activités, apprécié notamment eu égard à la provenance de ses ressources ».

Face au risque de représente la perte de l’agrément, l’association avait anticipé ces attaques et préparé une campagne de mobilisation de ses soutiens, de ses adhérents et partenaires associatifs, faisant notamment appel à VoxPublic, membre de la Coalition pour les libertés associatives, afin de l’accompagner dans sa stratégie de riposte. En février 2021, l’association a enregistré 1000 nouvelles adhésions, soit une hausse de 20% de ses effectifs !

Type d'action collective sanctionnée

  • Constitution en partie civile pour agir en justice dans des affaires de corruption.

Institution responsable

  • Premier ministre et ministre de la Justice,

Conséquences pour l’association

  • Impossibilité d’agir en justice sans agrément
  • atteinte à la réputation de l’organisation
  • destabilisation de l’organisation interne et épuisement militant
  • possible intimidation des donateurs et perte de revenus

Sources

Articles de presse :

Documents :

Date