Fiche n°72

Disqualification préfectorale et intimidations policières à la suite de la création d’un Observatoire des pratiques policières à Lille

Présentation

Après l’annonce, en mai 2019, de la création d’un observatoire lillois des pratiques policières par un collectif d’avocats, de syndicalistes, d’universitaires, d’associatifs, la préfecture du Nord répond par un communiqué qui disqualifie le collectif et l’un des membres est violemment interpellé, menacé, insulté et pris en photo lors d’une manifestation le samedi suivant.

Description

Mai 2019 :
Création de l’Observatoire lillois des pratiques policières (OLPP) « en réaction à la répression policière particulièrement violente qu’a connu la mobilisation des gilets jaunes ». Le collectif se donne pour objectif « de réaliser un travail d’observation méticuleux cherchant à recenser avec précision et sur le temps long les différentes pratiques de maintien de l’ordre dans le cadre des manifestations. ».

18 juin 2019 :
Conférence de presse de lancement de l’Observatoire lillois des pratiques policières (OLPP) en présence d’avocats, syndicalistes, universitaires, associations de droits de l’homme, etc. Le jour même, la préfecture du Nord publie un communiqué signé du préfet Michel Lalande qui attaque la création de l’observatoire :

« Malgré les accusations portées par les rédacteurs du communiqué (annonçant la création de l’OLPP) sur la répression inédite dont les Gilets jaunes feraient l’objet dans le département du Nord, force est de constater qu’une seule plainte pour violence policière a été recensée sur le département depuis le 17 novembre, date de début du mouvement, réplique le préfet Michel Lalande. En revanche, depuis cette même date, 655 interpellations ont été réalisées par les services de police pour des faits de violences, de dégradations de participation à un attroupement… Ces interpellations ont conduit dans leur immense majorité à des suites judiciaires. »

Le communiqué conclut avec une formulation qui a particulièrement retenu l’attention des médias :

« Cet observatoire a pour seule ambition d’éluder les pratiques des organisateurs de manifestations qui admettent en leur sein des individus violents, voire le revendiquent, confondant ainsi liberté de manifester avec liberté de dégrader les biens et d’outrager les personnes dépositaires de l’autorité publique »

20 juin 2019 :
Interviewée dans un article de La Voix du Nord, l’avocate Muriel Ruef qui fait partie de l’OLPP déclare :

« Je m’attendais à ce que le préfet nous vante l’irréprochabilité du maintien de l’ordre et nous promette de ce fait l’ennui. Mais lorsque je lis sous sa plume que la simple ambition d’observer voue un collectif d’associations, de syndicats et d’universitaires reconnus et sérieux à une telle déconsidération, je me dis que le collectif a malheureusement bien des raisons d’exister. »

22 juin 2019 :
Lors de la première manifestation suivant le lancement de l’OLPP, l’un des membres du collectif alors en situation d’observation se fait violement interpellé par des agents de la Brigade anti-criminalité (BAC) en amont de la manifestation. Les agents lui font comprendre qu’ils savent qu’il fait partie de l’Observatoire nouvellement créé. S’ensuit intimidations, menaces et insultes. Les policiers enregistrent son identité, son adresse postale et prenne son numéro de téléphone (qu’ils appellent pour en vérifier l’exactitude) et effacent les photos de son appareil personnel tout en le prenant en photos en retour.

Type d'action collective sanctionnée

Observation des techniques de maintien de l’ordre déployée en manifestation

Institution responsable

Préfecture du Nord

Sources

Entretien avec Julien O’Miel, universitaire, membre de l’OLPP, 10/06/2020.

Articles de presse :

Date