I - Le contexte et caractérisation des faits
Depuis 2018, un groupe de femmes musulmanes s’organise au sein de l’Alliance Citoyenne pour agir sur les exclusions dont elles s’estiment victimes à cause de l’interdiction du voile (dans les salles de sports, dans les compétitions sportives) ou du maillot de bain couvrant. Cette mobilisation a suscité de fortes critiques et de fortes polémiques, certains accusant cette demande des femmes d’être de nature communautariste, intégriste ou islamiste [1]. L’Alliance Citoyenne accueille des services civiques par le biais d’une convention d’intermédiaire avec Unis-cité. Des volontaires appuient les différents groupes (locataires mal logés, personnes en situation de handicap ou femmes musulmanes…).
Une vidéo est postée sur Twitter le 16 avril par Nessrine, une candidate à un service civique [2]. Dans sa vidéo, Nessrine affirme être en service civique depuis un mois et membre de l’Alliance depuis plus longtemps. Elle recherche des contacts de femmes voilées jouant au foot pour discuter avec elles et voir si elles seraient intéressées par la campagne pour les droits civiques des femmes musulmanes autour du foot : « Salut les filles, moi c’est Ness, j’ai été membre à l’Alliance pour le droit civique des femmes musulmanes et là depuis un mois je suis en service civique et je suis en train de travailler sur la campagne foot, et il y a un syndicat de footballeuses qui est en train de se monter justement. Je voulais savoir si vous avez des contacts, si vous connaissez des filles qui portent le voile et qui font du foot. Si oui, est ce que ce serait possible de me refiler les contacts pour que je puisse discuter avec elles et voir si elles seront intéressées pour la campagne ? Merci ! ». Cette vidéo est rapidement relayée par des comptes twitter d’extrême-droite l’accusant d’être une activiste islamiste et de promouvoir notamment « les pires valeurs islamistes sexistes contraires à la civilité et à la République ».
Le 4 mai 2020, l’Alliance Citoyenne reçoit une lettre d’Unis-Cités les informant du non-renouvellement de la convention d’intermédiaire entre les deux associations. Cette lettre de non renouvellement fait suite à l’interpellation d’Unis-Cités par la Direction Départementale de la Cohésion Sociale (DDCS) de l’Isère « au sujet d’une vidéo circulant sur les réseaux sociaux dans laquelle une jeune fille indique être en service civique depuis un mois avec “Alliance Citoyenne” autour d’une mission qui ne correspond pas à l’état d’esprit du service civique. » Ainsi, le partenariat est rompu avec l’association Unis-Cités et l’Alliance Citoyenne ne peut plus accueillir de volontaires en service civique via Unis-Cités. Les deux femmes musulmanes voilées qui souhaitaient réaliser leur volontariat en service civique au sein de l’association ne le font pas.
II - Justification de l’institution
La lettre envoyée par Unis-Cités le 4 mai 2020 informe l’Alliance Citoyenne que « la DDCS nous a demandé de ne pas renouveler la convention avec vous au vu de ces éléments. C’est, en effet, l’état via la DDCS qui valide ou non les missions de service civique et à l’Agence du Service Civique de valider les contrats des futurs volontaires. » La principale justification avancée par Unis-Cités et la DDCS est l’incompatibilité de la mission proposée avec l’état d’esprit du service civique, en effet, au sein de cette lettre de non -renouvellement, Unis-Cités explicite avoir été interpellé par la DDCS de l’Isère suite à la publication de la vidéo de Nessrine sur Twitter affirmant être en service civique depuis un mois et demandant des contacts dans le cadre de ce service civique pour accompagner une campagne de l’association. Unis-Cité affirme que « cette jeune fille n’est pas sous contrat en service civique ni avec vous [Alliance Citoyenne], ni avec nous [Unis-Cités] ».
III - Justification de l’association
En réaction, l’Alliance Citoyenne répond par courrier, le 7 mai 2020, à Unis-Cités afin de demander des explications quant à cette décision de non-renouvellement du partenariat. L’Alliance regrette l’erreur et « la confusion liée au confinement qui a amené le décalage entre l’accord pour la recruter [Nessrine] et le début effectif de sa mission ».
L’Alliance citoyenne met en évidence plusieurs éléments factuels permettant de mettre au clair leur relation avec Unis-Cités ainsi qu’avec les volontaires en service civique qui ont déjà participé aux missions et activités de l’Alliance. Dans un premier temps, Nessrine, depuis Mars 2020 était « simplement membre et n’est pas sous contrat avec nous, ni avec Unis-Cités. » Par ailleurs, la vidéo publiée est sur le compte personnel de cette jeune fille et a été retweeté par l’Alliance « comme elle retweet régulièrement les post des membres et partenaires sans en être l’émetteur. » Enfin, l’Alliance rappelle que « les missions des volontaires que nous accueillons sont validées en amont par les équipes d’Unis-Cités puis vérifiées lors de réunions régulières avec le référent d’Unis-Cités. […] Unis-Cités est bien placé pour savoir que contrairement à ce que Nessrine affirme, elle n’est pas en mission de de service civique quand elle parle dans cette vidéo et elle ne peut pas engager la responsabilité de l’association sur la définition et l’encadrement des missions de volontariat. »